Chapitre 34

 

Kahlan battit des paupières pour chasser le givre qui se déposait sur ses cils. En plaçant sur sa tête la capuche de son manteau, elle se maudit de nouveau de n’avoir pas troqué sa robe d’Inquisitrice contre une tenue plus adéquate. Debout sur les étriers, elle tira sur le tissu pour mieux protéger ses cuisses nues du contact glacial de la selle. Par bonheur, ses bottes montaient assez haut pour qu’elle n’ait pas froid aux mollets.

Chevaucher son bon vieux Nick, un cadeau de ses soldats galéiens, la réconfortait un peu. Sur cet étalon, elle avait mené des hommes à la victoire alors que toutes les chances étaient contre eux. Comparé à ça, le mauvais temps ne semblait pas grand-chose…

Cara et Berdine paraissaient aussi mal à l’aise qu’elle. Mais les frimas, dans leur cas, n’y étaient pour rien. Ces femmes redoutaient la magie, et elles avaient déjà fait dans la Forteresse un bref séjour qui ne leur donnait aucune envie d’y retourner.

Avant le départ, elles avaient tenté de dissuader l’Inquisitrice de se lancer dans l’aventure. Pour les faire taire, mentionner la peste avait suffi…

Nick aplatit les oreilles quand des soldats, à peine visibles à travers le rideau de neige, leur barrèrent le chemin. Elles venaient d’atteindre le pont de pierre qui marquait les limites de la ville, de ce côté.

Ravie de pouvoir passer sa mauvaise humeur sur quelqu’un, Cara lança quelques aménités aux hommes, qui rengainèrent aussitôt leurs épées.

— Une drôle de nuit pour se promener, Mère Inquisitrice, dit un sous-officier, très content d’avoir une autre interlocutrice que les Mord-Sith.

— Et plus encore pour monter la garde ici, compatit Kahlan.

— Il n’y a jamais de bonne nuit quand on a la Forteresse du Sorcier dans le dos, répondit l’homme.

— Ce bâtiment semble sinistre, mon ami, mais il est inoffensif.

— Si vous le dites, Mère Inquisitrice… Moi, je préférerais être en poste à l’entrée du royaume des morts.

— Personne d’autre n’a essayé de passer, sergent ?

— Nous n’avons pas vu âme qui vive. Sinon, il y aurait des cadavres dans la neige !

Kahlan talonna Nick, qui s’engagea en renâclant sur la pente sinueuse et glissante. Sachant d’expérience qu’il négocierait à merveille ces difficultés, sa cavalière le laissa avancer à sa guise. Derrière elle, les Mord-Sith semblaient très bien s’en sortir. Aux écuries, Cara avait pris sa jument par les naseaux et lui avait ordonné, les yeux dans les yeux, de ne pas lui « casser les pieds ». Bizarrement, l’animal paraissait avoir capté le message.

Avec autant de neige, l’Inquisitrice apercevait à peine les murs de la Forteresse. Avantage non négligeable, les chevaux, du coup, ne verraient pas le précipice qu’ils longeaient. Si Nick n’était pas du genre à s’affoler, elle ne connaissait pas les deux autres montures, et avec un à-pic pareil, tomber était un moyen imparable de ne plus risquer de mourir de la peste…

Hélas, à moins d’avoir des ailes, il n’y avait aucun autre chemin.

Dans ces tourbillons de flocons, la Forteresse semblait encore plus intimidante qu’à l’accoutumée. Pour ceux qui ne contrôlaient pas la magie – et ne la comprenaient pas non plus – ces lieux passaient facilement pour l’antichambre du royaume des morts.

Élevée en Aydindril, Kahlan y était venue un nombre incalculable de fois – seule, le plus souvent. Comme aux autres Inquisitrices, même enfant, on lui avait concédé un accès quasiment libre à ce haut lieu de la magie.

Quand elle était haute comme trois pommes, des sorciers l’avaient poursuivie dans les couloirs, menaçant de la chatouiller s’ils lui mettaient la main dessus. Pour elle, la Forteresse était un second foyer où elle se sentait en sécurité.

Devenue adulte, elle n’avait plus eu le droit d’y aller seule. Dès qu’elle prenait ses fonctions, une Inquisitrice ne courait plus le risque de se déplacer sans son sorcier, où qu’elle aille. Parce qu’elle s’était fait des ennemis, bien entendu. Les familles des criminels qu’elle « confessait » n’admettaient jamais qu’un des leurs ait pu commettre des atrocités. Pour se consoler, elles jetaient volontiers le blâme sur la femme qui avait confirmé la culpabilité du prévenu…

Les tentatives d’assassinat étaient le lot quotidien de Kahlan et de ses consœurs. Des mendiants aux monarques, une foule de gens rêvaient de les voir mortes.

— Sans le seigneur Rahl, demanda Berdine, comment traverserons-nous les champs de force ? Sa magie le lui permet, mais nous…

— Richard ne savait pas où il allait, coupa Kahlan. Ou il s’est fié à son instinct, ce qui revient au même. Moi, je connais les passages où on ne risque rien, même sans pouvoir particulier. Et si nous rencontrons des champs de force, ce seront des protections mineures qui ne m’arrêteront pas. En vous tenant la main, je vous permettrai de traverser, comme l’a fait Richard.

Cara ne cacha pas sa déception. À l’évidence, elle aurait préféré que les obstacles magiques les forcent à rebrousser chemin.

— Cara, j’ai passé mon enfance dans la Forteresse. Il n’y a aucun danger, et nous nous limiterons aux bibliothèques. Partout ailleurs, vous êtes mes protectrices. Entre ces murs, les rôles seront inversés. Nous sommes des Sœurs de l’Agiel, ne l’oublie pas. Je ne vous exposerai pas à une magie dangereuse. Tu me fais confiance ?

— Comment ne pas se fier à une Sœur de l’Agiel ? marmonna la Mord-Sith.

Les trois cavalières passèrent sous l’immense portail. Dans l’enceinte de la Forteresse, les flocons fondaient dès qu’ils touchaient le sol. Ici, il faisait agréablement tiède.

Kahlan abaissa sa capuche et secoua la neige qui couvrait son manteau. Puis elle s’emplit les poumons d’un air délicieusement printanier.

Nick hennit de satisfaction.

Kahlan guida les deux Mord-Sith jusqu’à une arche. Au-delà, elles s’engagèrent dans un long tunnel obscur.

— Pourquoi passons-nous par-là ? demanda Cara en sondant la pénombre que perçait à peine la lumière des lanternes accrochées à sa selle et à celle de Berdine. Le seigneur Rahl a choisi la grande porte, dans la cour…

— Je sais, et c’est en partie pour ça que la Forteresse vous effraie. Ce chemin-là est très dangereux. Moi, j’entre toujours par cette arche, et ça se passera beaucoup mieux, vous verrez.

» Cet accès était réservé aux résidents de la Forteresse. Les visiteurs passaient par une autre porte, où un guide s’enquérait de leurs intentions.

Au bout du tunnel, les trois femmes débouchèrent dans un splendide paddock verdoyant. Impatients d’en profiter, les chevaux accélérèrent le pas.

Une clôture délimitait le paddock, sauf sur la gauche, où il était adossé à un mur de la Forteresse.

Kahlan mit pied à terre et ouvrit la double porte des écuries. Après avoir dessellé leurs montures, les trois femmes les libérèrent dans le champ, où elles pourraient brouter et profiter de l’air pur et frais.

Cara et Berdine sur les talons, Kahlan gravit la dizaine de marches usées par le temps qui menaient à l’entrée proprement dite du bâtiment, défendue par une épaisse porte à deux battants.

— Qu’est-ce que c’est ? demanda soudain Berdine. Je viens d’entendre une sorte de chuintement…

— Il n’y a pas de rats ici, n’est-ce pas ? souffla Cara.

— Berdine a entendu une fontaine, tout simplement… Pour être franche, il y a des rats dans la Forteresse, mais pas où nous allons. Je te le jure, Cara ! Donne-moi ta lanterne, que je vous fasse découvrir en détail ce terrifiant donjon.

L’Inquisitrice aurait pu trouver son chemin sans lumière, mais elle avait besoin de la flamme de la lanterne. Quand elle eut repéré une des lampes-clés, fixée au mur sur sa droite, elle souleva le verre et l’alluma.

Dès que la flamme eut pris, des centaines de luminaires identiques s’allumèrent par paires – l’un en face de l’autre – dans un concert de sifflements et de crépitements. On eût dit que quelqu’un venait de tourner à fond la molette d’une lampe à huile géante.

Bouche bée, Cara et Berdine n’en crurent pas leurs yeux.

Une centaine de pieds au-dessus de leurs têtes, le toit vitré offrait une vue imprenable sur le ciel. Dans la journée, cette verrière géante laissait généreusement passer la lumière du soleil. La nuit, par beau temps, on pouvait éteindre les lampes et admirer le firmament, ou se dorer à la lumière de la lune.

Au centre du sol en mosaïque se dressait une fontaine en forme de feuille de trèfle. À travers un réseau de biefs, l’eau qui en jaillissait se répartissait dans une multitude de vasques disposées autour du bassin principal. Un muret de marbre assez large pour servir de banc entourait ce superbe ouvrage architectural.

— C’est magnifique…, souffla Berdine.

Un sourire sur les lèvres, Cara admirait les colonnes de marbre rouge qui soutenaient de splendides arches, sous la promenade qui courait tout au long du grand hall ovale.

— Ça ne ressemble pas à l’endroit où le seigneur Rahl nous a amenées… (La Mord-Sith se rembrunit.) Mais ces lampes… C’était de la magie, n’est-ce pas ? Et vous aviez promis de ne pas nous y exposer.

— J’ai parlé de magie dangereuse, Cara. Ces lampes sont un peu comme un champ de force, sinon qu’elles invitent les gens à entrer, au lieu de les repousser. C’est une magie amicale

— Amicale ? répéta Cara. Ben voyons !

— À présent, avançons ! Nous ne sommes pas ici pour le plaisir…

Afin de rejoindre les bibliothèques, Kahlan emprunta une série de couloirs élégants et bien éclairés sans rapport avec les sinistres tunnels qu’avait suivis Richard. En chemin, trois champs de force seulement les arrêtèrent provisoirement. Tenant ses compagnes par la main, l’Inquisitrice les fit traverser sans encombre, même si elles se plaignirent d’une sensation de picotement dans tout le corps.

Ces obstacles magiques ne défendant pas des zones très sensibles, il suffisait d’un minimum de pouvoir pour les franchir. Dans d’autres secteurs, comme celui qui menait à la salle de la sliph, l’Inquisitrice aurait été carbonisée sur pieds si elle avait tenté de passer. Dans ce cas précis, elle pensait que des itinéraires plus sûrs pouvaient également conduire au puits où vivait l’étrange créature. Il n’en restait pas moins que le Sourcier s’était joué de protections qu’aucun sorcier, à sa connaissance, n’avait jamais osé affronter.

À une intersection, Kahlan s’engagea dans un couloir aux murs rose pâle. Après être passée devant plusieurs grandes alcôves qui contenaient des bancs rembourrés – pour le confort des lecteurs et des visiteurs – elle ouvrit une double porte qui donnait sur une grande bibliothèque.

— Je suis venue ici…, dit Berdine. Je m’en souviens très bien.

— Tu as raison. Mais Richard t’a fait passer par un autre chemin…

L’Inquisitrice alluma de nouveau une lampe-clé. Aussitôt, la salle entière s’illumina.

Le parquet et les lambris, en chêne clair, brillaient comme si on les avait vernis la veille. Le jour, les grandes fenêtres, sur le mur du fond, laissaient entrer les rayons de soleil et offraient une vue panoramique sur Aydindril. Ce soir, à travers la neige, Kahlan apercevait à peine les lumières de la cité.

Elle avança entre les rangées de tables et d’étagères et chercha à se repérer. Si sa mémoire ne la trompait pas, on comptait, dans cette seule salle, cent quarante-cinq rayonnages lestés de livres. Et ils grimpaient jusqu’au plafond. Heureusement. les tables de lecture pourraient servir de surface de tri.

— C’est ça, la bibliothèque de la Forteresse ? s’étonna Cara. Au Palais du Peuple, en D’Hara, nous en avons de plus grandes.

— Possible, répondit Kahlan, mais ici, on en compte vingt-six de cette taille. Tu imagines combien ça fait de milliers de livres ?

— Dans ce cas, dit Berdine, comment trouver celui qui nous intéresse ?

— C’est plus facile qu’on pourrait le croire… Ces bibliothèques risquent de devenir un labyrinthe mortel, quand on est en quête d’une information. J’ai connu un sorcier qui a cherché un ouvrage toute sa vie – sans y parvenir.

— Et pour nous, ce serait « facile » ?

— Oui, parce que les textes consacrés à un sujet très précis sont conservés ensemble. Les manuels de langues, par exemple. Comme ils ne traitent pas de magie, ils sont rangés sur la même étagère, par ordre alphabétique. Mais j’ignore de quelle façon sont classés les grimoires et les recueils de prophéties. En admettant qu’ils le soient.

» Les archives judiciaires sont regroupées dans cette salle. Je n’ai jamais consulté les minutes des procès, mais on m’en a souvent parlé.

Kahlan s’engagea entre deux rangées d’étagères et s’arrêta après une dizaine de pas.

— Nous y voilà ! À voir les dos, ces textes sont dans une multitude d’idiomes. Comme je les connais presque toutes, à part le haut d’haran, je m’en chargerai. Cara, occupe-toi des livres écrits dans notre langue. Berdine, concentre-toi sur les volumes en haut d’haran.

Elles commencèrent à sortir des livres des rayons, puis allèrent les poser sur tes tables en formant trois piles distinctes. Leur moisson fut beaucoup moins abondante que Kahlan le redoutait. Quinze volumes pour Cara, onze pour elle et sept pour Berdine.

La Mord-Sith aurait besoin de temps pour déchiffrer le haut d’haran. L’Inquisitrice parlant couramment les langues de ses onze ouvrages, elle aurait terminé très vite et pourrait donner un coup de main à Cara.

Dès qu’elle eut commencé, Kahlan constata que le travail serait moins compliqué que prévu. Chaque procès s’ouvrant sur l’énoncé de l’accusation, éliminer ceux qui ne concernaient pas le Temple des Vents serait un jeu d’enfant.

Les délits allaient du vol de babioles au meurtre avec préméditation. Une envoûteuse soupçonnée de s’être jeté un sort de beauté avait été innocentée. Reconnu coupable d’avoir cassé le bras d’un camarade lors d’une bagarre, un apprenti-sorcier de douze ans s’était vu condamné à un an de suspension de sa formation. La peine semblait lourde, mais il avait utilisé la magie pour blesser son adversaire.

Un sorcier accusé pour la troisième fois d’ivrognerie et de violence avait été condamné à mort et exécuté deux jours plus tard, une fois son vin cuvé.

Fascinée par ces comptes rendus de jugements, Kahlan dut se forcer à accélérer le rythme. Elle n’était pas là pour découvrir les arcanes de la justice, mais pour trouver une référence au Temple des Vents ou à un groupe de sorciers accusés d’un crime.

Les Mord-Sith aussi avancèrent plus vite que prévu. Au bout d’une heure, Kahlan referma son dernier volume. Il en restait trois à Berdine et six à Cara.

— Toujours rien ? demanda l’Inquisitrice.

— Non, répondit Cara, mais j’ai lu l’histoire d’un sorcier qui aimait baisser son pantalon devant des femmes, sur la place du marché de la rue Stentor, et leur ordonner d’« embrasser son serpent ». J’ignorais que les sorciers pouvaient être aussi fous que les hommes normaux.

— Ce sont des gens comme les autres, mon amie…

— Non, parce qu’ils contrôlent la magie !

— Moi aussi, dans une certaine mesure. Me trouves-tu « anormale » ? Berdine, tu as déniché quelque chose d’intéressant ?

— Rien qui puisse nous servir… Seulement des crimes classiques…

Kahlan fit mine de prendre un livre, sur la pile de Cara, mais elle se ravisa.

— Berdine, tu as été dans la salle de la sliph ?

— Oui, mais je préférerais ne pas y repenser, si ça ne vous dérange pas…

Kahlan ferma les yeux et tenta de se représenter mentalement les lieux. Elle revoyait très bien les restes de Kolo et le puits de la sliph. Mais qu’y avait-il d’autre dans la pièce ?

— Tu te rappelles s’il y avait des livres, à part le journal de Kolo ?

La Mord-Sith se mordilla le bout d’un index, le front plissé par la concentration.

— Le journal était ouvert sur la table, à côté d’un encrier et d’une plume. Près de la chaise, le squelette de Kolo gisait sur le sol, ses vêtements en lambeaux. Mais sa ceinture de cuir et ses sandales avaient résisté au passage du temps…

Ce tableau correspondait au souvenir de Kahlan.

— Tu sais s’il y avait des livres, sur les étagères ?

— Non…

— Que veux-tu dire ? Il n’y en avait pas, ou tu es incapable de répondre ?

— La deuxième possibilité… Le seigneur Rahl était tout excité d’avoir trouvé le journal de Kolo. Depuis le début, il cherchait autre chose qu’un livre normal. Nous sommes partis peu après…

— Finissez de consulter ces ouvrages, dit Kahlan en se levant. Je vais jeter un coup d’œil dans la salle de la sliph. Juste au cas où…

— Je vous accompagne ! s’exclama Cara.

Elle se leva si vite qu’elle renversa sa chaise.

— Il y a des rats, en bas…

— J’en ai déjà vu, Mère Inquisitrice. Et ce n’est pas ça qui m’arrêtera !

De la pure bravade, comprit Kahlan, qui avait vu blêmir la Mord-Sith.

— Cara, c’est inutile. Dans la Forteresse, je n’ai pas besoin de votre protection. Partout ailleurs, elle m’est indispensable. Ici, vous êtes plus en danger que moi. Et j’ai promis de ne pas vous exposer à une magie dangereuse. Comme celle de cette salle-là…

— Dans ce cas, vous serez aussi menacée.

— Non, parce que je sais à quoi m’attendre. Pour vous, le péril serait grand. Moi, je suis née ici, et on m’a laissée courir en liberté dans la Forteresse dès que j’ai su marcher, ou quasiment. Parce qu’on m’avait appris à identifier le péril et à l’éviter…

» Reste avec Berdine, et finis-en avec ces livres. Dès que nous aurons trouvé le bon, nous retournerons auprès de Richard, qui a besoin de notre protection à toutes.

— Vous avez peut-être raison sur les deux points…, concéda Cara. Je suis novice en magie, et nous aurions intérêt à rentrer au plus vite au palais. Parce qu’une certaine prédatrice risque de profiter de notre absence…

Le Temple des Vents - Tome 4
titlepage.xhtml
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_000.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_001.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_002.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_003.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_004.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_005.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_006.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_007.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_008.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_009.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_010.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_011.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_012.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_013.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_014.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_015.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_016.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_017.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_018.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_019.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_020.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_021.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_022.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_023.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_024.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_025.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_026.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_027.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_028.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_029.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_030.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_031.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_032.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_033.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_034.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_035.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_036.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_037.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_038.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_039.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_040.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_041.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_042.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_043.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_044.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_045.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_046.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_047.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_048.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_049.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_050.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_051.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_052.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_053.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_054.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_055.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_056.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_057.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_058.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_059.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_060.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_061.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_062.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_063.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_064.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_065.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_066.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_067.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_068.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_069.htm
Epee de Verite 4 - Le temple des Vents (X)_split_070.htm